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   l'analyse complète de la menace terroriste

 

 
     
   
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le problème de la dispersion et la circulation des munitions dans le monde



chapitre VI
conclusion du dossier...

 

L’établissement d’un régime de contrôle sur les transferts de munitions est une tâche complexe, probablement sans commune mesure avec les traités et conventions de désarmement déjà réalisés. Contrairement aux armes nucléaires, les munitions de petit calibre sont amplement diffusées à travers le monde. Contrairement aux armes chimiques et bactériologiques, leur influence militaire est considérable, pour la quasi-totalité des Etats du monde. Contrairement aux mines antipersonnel, elles contribuent de façon décisive à la politique de sécurité et d’influence de ceux-ci. Contrairement aux armes à feu, elles peuvent être facilement manufacturées et transférées, en vastes quantités, pour un coût raisonnable et peuvent modifier fondamentalement les rapports de forces dans les zones de crises. Dans son principe même, toute négociation sur une régulation des transferts de munitions est donc amenée à différer de ce qui à été fait jusqu’à présent.

La question technique est cependant relativement simple au regard des problèmes politiques soulevés. L’efficacité d’un contrôle suppose en effet que la majorité des fournisseurs en acceptent les modalités et les respectent. Or, contrairement aux armes lourdes, les munitions sont produites dans une multitude des pays, dont la plupart ne sont pas aptes à appliquer les contrôles, faute d’administration compétente ou de volonté de le faire. L’adhésion partielle à un régime de régulation des pays les plus industrialisés et les plus volontaires risquerait alors de créer de sérieuses distorsions économiques ainsi qu’un certain nombre d’effets pervers. L’assèchement du marché provoqué par l’adhésion des grands producteurs occidentaux conduirait en effet à une augmentation des prix, et provoquerait inévitablement un développement accéléré des capacités de production ‘’exotiques’’, non soumises à la contrainte, et une explosion du marché gris. A terme, le problème de la diffusion sauvage des munitions de guerre se trouverait renforcé, et la validité du régime de contrôle remis en cause.


Enfin et surtout, c’est l’approche politique qui suscite le plus de difficultés. Le rôle primordial que jouent actuellement les armes de petit calibre dans la résolution des conflits de faible et moyenne intensité  leur donne une finalité stratégique, accessible à tous. De ce fait, les plus grands pays proliférant se trouvent sur un pied d’égalité avec les plus petits, dans le sens où le rôle de pourvoyeur d’arme peut être assuré par n’importe quel Etat qui se donne les moyens de cette politique. Refuser de transférer armes et munitions revient à mettre en péril son influence stratégique sur les zones de crise, ce que peu de gouvernements sont prêts à accepter. Les pays occidentaux montrent d’ailleurs la voie en ce domaine, puisqu’en dépit de réticences morales croissantes des opinions publiques, les moyens administratifs et législatifs de transferts ne sont pas remis en cause, ou sont même accrus. Les politiques de dons d’armements (EDA et cascading) témoignent à cet effet d’une volonté explicite des Européens et des Américains de se positionner durablement sur les marchés de l’armement, autant pour des motifs politiques qu’économiques d’ailleurs.

Est-ce à dire que le contrôle des transferts de munitions est une tâche sans issue ? Paradoxalement, il est probable que ce type de réglementation est la plus à même de produire des effets positifs. Les formes de combat actuelles, axées sur le tir de saturation et menées par des troupes peu expérimentées nécessitent l’utilisation de quantités considérables de cartouches pour qu’un résultat militaire autre que marginal puisse être attendu. Il est certain que, dans l’immense majorité des zones de crises, des résultats similaires pourraient être obtenus avec un nombre de belligérants moins nombreux, mais mieux entraînés. Au vu du nombre d’armes de guerre disponibles sur le marché, tenter de restreindre la diffusion des fusils d’assaut n’aurait probablement que peu d’impact. Par contre, endiguer le flux logistique qui permet leur utilisation diminuerait automatiquement l’intensité et la quantité des échanges de tir, provoquant de facto le désarmement des troupes les moins aptes aux combats, troupes qui sont par ailleurs les plus dangereuses pour les civils. Il faut toutefois garder à l’esprit que l’assèchement du marché n’est possible que si les gouvernements disposent de la volonté politique de le faire. Dans cette optique, il est essentiel que les fournisseurs les plus responsables puissent se maintenir, et que les mesures de restriction ne les pénalisent pas au détriment de concurrents moins scrupuleux. Tout régime de contrôle devrait donc se faire dans l’optique d’une régulation mesurée des flux, qui favoriserait les pays les plus démocratiques, sensibles aux pressions morales des opinions publiques, et qui marginaliserait les pays totalitaires. On ne parlerait plus alors de désarmement, mais de contrôle des armements, dans la tradition des années soixante-dix.

La moralité d’un tel raisonnement est discutable. Il faut cependant remarquer que la perpective d’un contrôle absolu des armements dans le domaine des armes de petit calibre est impensable dans l’état actuel du monde. Les efforts doivent donc s’orienter vers une réduction progressive de leur létalité globale, ce qui passe par une meilleure maîtrise de leur diffusion. Diverses politiques sur la transparence des transferts et des stocks peuvent être mises en œuvre pour ce faire. Mais à long terme, il est probable que c’est du coté des licences et de l’évolution technologique que les plus grands progrès peuvent être attendus. Au niveau technologique, la mise en œuvre de munitions et d’armes de nouvelle génération devrait contribuer à déclasser lentement mais sûrement les armes les plus anciennes, en particuliers celles utilisant le 7.62, qui sont l’une des principales cause de mortalité due aux armes à feu. L’élimination du 7.62 et la promotion des cartouches de 5.56 à haute vélocité est dans l’intérêt de tous, ces dernières étant plus difficiles à produire et donc moins diffusées. Parallèlement, une application restrictive des attributions de licences pourrait permettre aux pays occidentaux de garder la maîtrise d’œuvre de ces technologies, ou du moins d’en ralentir la diffusion. De surcroît, la vente d’usines de fabrication clef en main pour ce type de munitions devrait être strictement surveillée, au même titre que les ventes de matériel stratégique.

En fait, contrairement à ce que la tendance actuelle des négociations de désarmement laisse à penser, il est probable que seule l’approche traditionnelle du contrôle des armements ait une chance de donner des résultats dans le domaine des munitions. Elaborée dans l’optique désormais classique de la domination par l’évolution technologique et de la non-prolifération par la restriction de l’accès aux connaissances, elle ne peut s’inscrire que dans un projet politique, sans considérations pour les ambitions morales des opinions publiques et des médias. Dans ce sens, le contrôle des transferts doit devenir une priorité stratégique à part entière, priorité pour laquelle les Etats les plus puissants tentent d’imposer leurs avantages et de minimiser ceux des autres. C’est alors qu’un réel désarmement pourra éventuellement être mis en œuvre. L’histoire a montré que cette démarche était valable pour les armes nucléaires. Peut être l’est elle aussi pour les munitions de petit calibre ?


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